Parlons de l’aide pour aujourd’hui

Parlons de l’aide pour aujourd’hui

La dernière fois que j’ai discuté avec vous, je vous ai demandé ce que vous pensiez de la recherche sur les maladies cognitives au Canada et des défis que nous devions affronter ensemble.

Les supporteurs de la cause qui, comme vous, parlent de leur propre expérience conviennent que ce problème n’est pas un problème qui se présentera demain au Canada, mais bien qu’il est on ne peut plus actuel!

Je me tourne à nouveau vers vous aujourd’hui pour faire le point sur où nous en sommes et vous demander de nous communiquer vos idées.

La Stratégie nationale sur les maladies cognitives : où en sommes-nous?

En tant que chef de la direction de la Société Alzheimer du Canada, je suis heureuse d’avoir été invitée à coprésider le Comité consultatif ministériel sur la démence du ministère de la Santé.

Ce Comité a été constitué un peu plus tôt cette année pour conseiller le ministère sur la préparation de la stratégie nationale sur les maladies cognitives du Canada. Cet automne, nous en examinerons une ébauche, et d’ici le printemps 2019, j’espère voir une stratégie terminée et intégralement financée.

Le Comité consultatif comprend deux personnes atteintes d’une maladie cognitive et deux aidants. De nombreux administrateurs du conseil, moi y compris, comptent ou ont compté parmi les membres de leur famille des personnes atteintes d’une maladie cognitive. Je puis vous assurer que la voix des personnes ayant une expérience vécue de ces maladies est entendue.

Je peux également vous communiquer que la ministre de la Santé, l’Honorable Ginette Petitpas Taylor, s’intéresse particulièrement et personnellement à cette initiative, car sa propre mère est atteinte d’une maladie cognitive.

À l’échelle nationale, la stratégie nationale sur les maladies cognitives bénéficie d’un soutien extrêmement important, pour autant qu’elle débouche sur de réels progrès et qu’elle ait un impact positif sur la vie des gens.

Pour avoir l’impact nécessaire, un solide engagement budgétaire de la part du gouvernement est nécessaire, mais je crois que la volonté d’agir pour combattre cette crise sanitaire nationale est belle et bien réelle.

La communauté des personnes touchées par les maladies cognitives partout au pays suit avec un grand intérêt la préparation de cette stratégie : les chercheurs, les praticiens des soins de santé, les personnes atteintes et les aidants.

La Conférence nationale sur les maladies cognitives qui s’est tenue en mai dernier était axée sur trois piliers principaux. Nous prévoyons donc qu’ils feront partie de la stratégie nationale; les voici :

  1. Plus d’investissement dans la recherche sur les maladies cognitives, les soins de santé et les services communautaires.
  2. Amélioration des aides pour les personnes atteintes et les aidants.
  3. Programmes de sensibilisation et de formation qui enrayent la stigmatisation entourant les maladies cognitives.

La Société Alzheimer du Canada soutient activement chacun de ces piliers, mais il y a encore beaucoup de travail à faire…

Plus d’investissement dans la recherche sur les maladies cognitives, les soins de santé et les services communautaires

Depuis quelques années, les chercheurs sont de plus en plus convaincus que l’on peut réduire les risques de développer une maladie cognitive.

Leurs recherches indiquent que le processus de la maladie débute au moins 20 ans avant l’apparition des symptômes… et peut être même dans la trentaine ou la quarantaine.

Quand le stade initial de la maladie d’Alzheimer est identifié, il est déjà trop tard pour qu’une thérapie existante puisse l’enrayer ou y mettre un terme. Il faut très rapidement réduire les risques en faisant certains choix en matière de style de vie, ainsi que d’autres thérapies de prévention. C’est uniquement de cette manière que nous pourrons réduire la prévalence de la maladie jusqu’à ce que des thérapies efficaces pouvant la modifier soient découvertes et mises à disposition.

« Nous avons des preuves, mais ces connaissances doivent se traduire en actes : que cela signifie plus d’établissements de soins, plus de soins de répit ou un meilleur accès aux programmes de jour, nous devons changer les pratiques actuelles pour atteindre les résultats escomptés. »

Sachant cela, les scientifiques cherchent à mieux comprendre ce qui provoque les maladies cognitives. Ils évaluent la possibilité d’effectuer des tests sanguins et de mener des examens par imagerie qui pourraient être proposés par le biais du système de soins de santé, des dizaines d’années avant que les signes externes des troubles cognitifs ne fassent leur apparition chez des personnes à haut risque.

Mais même si nous le pouvions, par je ne sais quel miracle, arrêter les nouveaux cas de maladie cognitive de demain, il y a actuellement plus d’un demi-million de Canadiens qui doivent composer avec ses effets dévastateurs. Nous sommes confrontés à un système de soins de santé déjà saturé qui doit répondre aux besoins de ces personnes aux différents stades de la maladie.

Alors, que pouvons-nous faire aujourd’hui?

Eh bien, nous n’avons pas 20 ans pour mener nos recherches. Apporter son aide aujourd’hui signifie mener des recherches sur la qualité de vie. C’est un aspect qui prend de plus en plus d’importance. Les preuves relatives au style de vie, à la nutrition et aux approches efficaces aux soins et aux services dont nous disposons actuellement peuvent être mises en pratique et ont un véritable impact bien plus rapidement.

Amélioration des aides pour les personnes atteintes et les aidants

Penchons-nous sur l’importance des aidants. Il est bien moins cher pour une personne atteinte d’une maladie cognitive de vivre chez soi avec un aidant, plutôt que dans un établissement de soins de longue durée – et beaucoup plus économique, que d’occuper des lits pour soins intensifs en environnement hospitalier.

Cependant, les aidants ne sont pas adéquatement appuyés :

  • Ils vivent des niveaux de stress élevé provoqué par les soins apportés aux membres de la famille. Grâce aux recherches, nous savons que les aidants eux-mêmes sont exposés à un risque plus important de développer une maladie cognitive ou d’être atteints d’autres maladies graves à cause de ce stress qui s’ajoute à leur vie quotidienne.
  • Le répit personnel est aussi un problème. Les aidants dorment moins et n’ont pas le temps de s’occuper de leurs propres besoins. À cause du manque d’options de soins alternatives, ils ont plus tendance à moins bien s’alimenter, avoir des préoccupations financières et à ne pas prendre de vacances.
  • Il est difficile d’équilibrer les responsabilités inhérentes à la prestation des soins et celles du travail; les aidants trouvent qu’ils sont obligés de prendre un congé pour des urgences médicales, des rendez-vous et des absences prolongées. Tout cela a un impact sur la productivité et l’économie du Canada.

Si la santé des aidants est moins bonne à cause de ces pressions, ils ne reçoivent clairement pas le soutien dont ils ont besoin. Le coût est énorme… pour la personne et pour la société.

Nous avons des preuves, mais ces connaissances doivent se traduire en actes : que cela signifie plus d’établissements de soins, plus de soins de répit ou un meilleur accès aux programmes de jour, nous devons changer les pratiques actuelles pour atteindre les résultats escomptés.

Les soins de longue durée jouent un rôle essentiel dans l’équation. Il y a de nombreuses raisons pour lesquelles les familles pourraient décider qu’un tel choix est nécessaire et adapté à leur situation. On estime que 70 à 80 % des personnes vivant dans un établissement de soins de longue durée sont atteintes, à un degré ou à un autre, d’un trouble cognitif — y compris de la maladie d’Alzheimer ou d’une autre forme de maladie cognitive.

La Société finance plusieurs études connexes grâce à son Programme de recherche. Les études portant sur le volet « Qualité de vie » aident à appuyer les établissements de soins de longue durée grâce à des programmes de formation du personnel et au développement de pratiques exemplaires en matière de soins pour les personnes atteintes d’une maladie cognitive.

Une étude se penche actuellement sur comment les membres du personnel de ces établissements interagissent avec les résidents pendant les repas. La manière dont les interactions se déroulent à ce moment peut faire une grande différence dans la vie d’une personne vivant dans l’un de ces établissements. Peut-être s’agit-il d’un seul élément de ce type de vie, mais il ne faut pas le négliger, surtout lorsqu’on pense qu’il y a trois repas et deux moments pour la collation par jour.

Les leçons tirées d’études comme celles-ci sont cruciales. Actuellement, trop de personnes, les personnes atteintes comme les aidants, doivent lutter inutilement contre ces maladies. Nous pouvons les aider en concrétisant les résultats de ces recherches.

Programmes de sensibilisation et de formation qui enrayent la stigmatisation entourant les maladies cognitives

Au final, l’objectif de chaque chercheur dans ce domaine consiste à améliorer la qualité de vie de toutes les personnes atteintes d’une maladie cognitive. Traduire ces connaissances en actes en changeant les approches et les pratiques est ce qu’il y a de plus difficile, car cela demande un engagement financier… et résoudre ces problèmes est cher.

Changer les idées est difficile. C’est un énorme défi. On sent que les choses ne bougent pas assez vite. En tant qu’organisation, nous entendons cela tout le temps de la part de clients qui se tournent vers nous pour obtenir des services supplémentaires; des services que nous ne sommes pas toujours en mesure d’offrir.

Briser la résistance au changement des systèmes actuellement en place demande beaucoup d’énergie. Les programmes de formation et les campagnes de sensibilisation peuvent aider à combattre la stigmatisation, changer l’opinion du public et recueillir du soutien pour le changement.

Je crois que chacun d’entre nous, dans la communauté des personnes touchées par les maladies cognitives, doit s’efforcer de faire entendre la voix des personnes ayant une expérience vécue de ces maladies pour obtenir les résultats escomptés. Sinon, nous pourrions être incapables de combler les véritables besoins des personnes atteintes et des aidants : les programmes qui auront le plus grand impact positif sur leur vie.

Faire part de votre expérience et de vos idées sur la manière dont nous pourrions améliorer l’aide d’aujourd’hui est incroyablement précieux. Quelle que soit la forme que prend votre participation, c’est une contribution bienvenue au débat.

Assurez-vous que votre voix soit entendue. J’ai hâte de vous entendre.

Cordialement,

Pauline Tardif

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